Donnerstag, 16. Februar 2012

A propos du texte: «Le dernier caprice de la gauche»

Cher Hordalf,

D'abord merci pour votre texte «Le dernier caprice de la gauche». Je n'ai rien à redire. C'est très bien écrit, sans flagornerie aucune.

Permettez-moi un complément : sur un point crucial, l'Europe me semble sinon supérieure, du moins extrêmement développée. Il s'agit de la capacité à se remettre en question, régulièrement et profondément, une spécificité toute européenne pour autant que je le sache.

Je ne parle pas du catéchisme superficiel professé par les autosatisfaits, tels que décrits par votre texte. Précisément, ces gens ont, au fond d'eux-mêmes, *renoncé* à cette remise en question, sans quoi il se comporteraient d'autre façon.

"Ça sent la phase terminale." Certes ! Une fois le dégoût accepté, l'honnêteté envers soi-même n'exige-t-elle pas de penser le futur ? Si le discernement reste vivant chez certains, ne faut-il pas y voir notre dernière chance ? Celle-ci ne mérite-t-elle pas d'être tentée ?

Sans rejeter en bloc l'héritage des Lumières, il devient urgent de remettre en question démocratie et - oui ! - confort matériel. Les craintes de Tocqueville se réalisent, et, comme vous, je doute que tout un chacun soit à même de décider du devenir de la Cité.

Alors, comment prévenir que nos peuples se laissent à nouveau glisser le long de la ligne de plus grande pente, comme aujourd'hui ? Devant l'échec manifeste et répété des volontés de "construire un monde meilleur", on peut proposer des bases entièrement négatives [1].

Sans doute faudra-t-il renoncer à la FACILITE, à l'accès inconditionnel à la puissance décisionnelle et matérielle, cet accès n'étant raisonnable que pour ceux faisant preuve de suffisamment de talent et d'autodiscipline. Celle-ci me paraît cruciale.

Quand, comment et à qui donner - ou enlever - cet ou ces accès ? Comment éviter la dégénerescence d'un tel système en une oligarchie ? Ces questions restent ouvertes. Quelques suggestions en [1] et [2].

Pour détendre un peu l'atmosphère :

http://blog.sami-aldeeb.com/2012/02/15/ne-prends-pas-la-vie-trop-au-serieux-personne-nen-sort-vivant/

Broadcast (un parallèle visuel)

Bonne continuation !

Eurisprep

PS: merci à la Police du monde parodique pour les illustrations.

.

[1]
http://eurisprep.blogspot.com/2011/07/re-bas-relief.html
[2]
Dans le même esprit que le onzième commandement de Glucksmann «Que rien de ce qui est inhumain ne te soit étranger», peut-être faut-il en priorité définir ce qui ne doit pas être, se basant sur des faits historiques négatifs - dans tous les sens du terme "négatif" :
a
Le monde change en permanence, donc aucune loi ne peut avoir de sens éternel. D'autre part, aucun corpus de loi n'est humainement applicable au-delà d'une certaine taille. Donc : toute loi doit être régulièrement révisée, et changée ou abandonnée.
b
Les lois ne suffisent pas pour garantir le bon fonctionnement ni la durée d'une société [3]. Donc : "common decency", autodiscipline et vie locale sont nécessaires. Celles-ci ne sont pas possibles sans un minimum d'homogénéité culturelle. Ceci interdit en particulier toute immigration massive.

D'autre part, un temps réservé à la vie intérieure est nécessaire pour pouvoir dans l'action correctement décider dans des situtations non prévues par la loi. Temps professionnel excessif aussi bien que matraquage publicitaire sont alors purement et simplement interdits.

Il s'agit d'abord de permettre une vie intérieure [4].
c
Tout groupe ou hiérarchie, au-delà d'une certaine taille, nuit plus aux humains qu'il ne les aide, générant au final le chaos. Un chef particulièrement doué peut temporairement suffire, mais sitôt celui-ci disparu, désengagement individuel et chaos reviennent.

Donc : toute organisation doit être régulièrement examinée, et si besoin changée, divisée ou purement et simplement dissoute.

En particulier, de petites entités réunies par des pactes bi- ou multilatéraux sont préférables à de grandes nations ou empires. Comparez France, Allemagne et Russie du siècle dernier à la Suisse. Organiser des petites entités comme les organes du corps humain ?
d
L'homme n'est pas fait pour une existence totalement confortable, ni totalement sans risque. Des épreuves physiques et un contact régulier avec la nature doivent être obligatoires, y compris pour mieux se connaître soi-même, permettant l'autodiscipline nécessaire à la maîtrise des puissances décisionnelles et matérielles.

Je ne rêve pas non plus d'une nouvelle Sparte (voir f). Par contre le rêve moderne de "s'abstraire de la nature" doit être définitivement jeté aux orties. Appréhender la nature comme cirque de loisirs ne permet pas non plus de contact profond.
e
Pour minimiser les risques d'apparition d'une oligarchie, l'accès aux puissances décisionnelles et matérielles doit être ouvert à tous ET strictement contrôlé par les autres (par les "élus", mais pas seulement). Talent et autodiscipline sont dans tous les cas nécessaires, tels qu'adaptés à l'objet de puissance - ne jamais accéder à tout à la fois.

En pratique, là aussi, bien que restant attaché à l'ouverture de l'école républicaine telle qu'elle fut, je critique sa taille. Seules de petites entités peuvent éviter :
  • la mafia actuelle de grands syndicats non représentatifs,
  • le danger de programmes uniques réécrivant l'Histoire, et de directives imposant le "laxisme obligatoire" en classe,
  • la rigidité de l'accès via les examens (voir g), parfois inadaptée à certains cas de figure.
  • l'accès à la puissance ne saurait être définitif, sans quoi l'on nuit aussi bien à "l'élu" (voir f) qu'à l'utilisation faite de
    la puissance. Oubliez les "clubs" ENA, Siècle etc.
  • ces considérations ne se limitent donc pas à l'école.
f
L'homme n'est pas fait pour une existence monotone. Pour les psychiatres, vivre des phases successives est même une nécessité, dont l'absence caractérise les désordres maniaques. Aucune activité professionnelle ne doit donc occuper la majeure partie du temps éveillé. Ceci incite donc à la multi-activité.

En passant, la vie professionelle moderne est une imbécillité biologique [5], et dévore tant d'énergie qu'il est difficile de ne pas devenir un tant soit peu "idiot" au sens antique du terme.
g
(extension de a et b) Aucune loi ne fonctionne correctement dans tous les cas. Tous les cas possibles ne peuvent être envisagés.

Permettre explicitement d'enfreindre la loi (ce qui se passe de toutes façons) est donc bénéfique. Ceci amène donc à un contrôle quantitatif : punir le viol systématique de la loi, ainsi que le laxisme systématique des agents de la loi, mais permettre *explicitement* quelques exceptions - pour que les agents de la loi n'aient pas peur de "laisser couler" de temps à autre.

Voire même encourager ces agents à déclarer les exceptions faites, pour les dédouaner via un contrôle quantitatif.

Enfin, aucune couverture législative des moindres détails de la vie n'est souhaitable (ni même possible). Donc : autant que possible, expliciter ce qui est laissé ouvert, au jugement de chacun.
[3]
«Le déclin du courage» par Alexandre Soljénitsyne.
[4]
«The pursuit of happiness» par Boris Johnson, http://www.spectator.co.uk/essays/all/30987/the-pursuit-of-happiness.thtml
[5]
«Les huit péchés capitaux de notre civilisation» par Konrad Lorenz, chapitre 4.

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